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L’incendie de Moscou - 16 septembre 1812
Le 24 juin 1812, Napoléon franchit le Niémen et se lance dans sa fatale campagne de Russie. Dans son armée de 675 000 hommes, la plus formidable qu’on ait jamais vue, il y a fort peu de Français; voulant associer toute l’Europe à sa croisade, comme le fera Hitler cent vingt-sept ans plus tard, Napoléon a groupé des contingents français, allemands, suisses, italiens, hollandais, croates, polonais, en une multitude que les Russes appelleront «l’armée des vingt nations»; pareille hétérogénéité est un important facteur de faiblesse. Les Russes pratiquent la «terre brûlée» et refusent le combat; ils poussent ainsi l’adversaire à s’enfoncer profondément dans le pays et à s’y épuiser. Les Français parviennent jusqu’aux portes de Moscou; cette fois, les Russes résistent: c’est la sanglante et indécise bataille de Borodino, qui ouvre la ville à Napoléon. Mais la retraite des Russes n’est qu’apparente; ils se préparent à enfermer leurs ennemis dans un piège. La ville aux cent coupoles éblouit les Français; Napoléon pense y établir ses quartiers d’hiver et y attendre tranquillement des renforts; il est persuadé que le tsar ne tardera pas à demander la paix. On en est fort loin: le terrible comte Rostopchine, gouverneur de Moscou, a tout prévu pour rendre intenable la position des Français; il a formé des sortes de commandos omniprésents et insaisissables. Avant le départ de l’armée russe, il a ouvert les prisons et les asiles d’aliénés, il a armé les détenus de torches avec consigne de bouter le feu partout; il a surtout pris soin d’emmener toutes les pompes à incendie. Au matin du 16 septembre 1812, de grandes flammes s’élèvent des magasins d’eau-de-vie, puis des bazars où s’entassent vivres et marchandises; dans cette ville construite surtout en bois, des centaines de maisons s’embrasent à leur tour. Les pompes faisant défaut, il est impossible de lutter contre les flammes. D’énormes richesses risquant d’être englouties, les soldats se livrent au pillage; le désordre gagne l’armée, dont la majeure partie s’est repliée hors de la ville. On doit extraire hâtivement l’Empereur du Kremlin où un dépôt de poudre menace de sauter. Au bout de trois jours, l’incendie s’apaise enfin; il ne reste que 2000 maisons sur 10000. Ce tragique épisode ouvre les yeux de LEmpereur: l’ennemi est allé jusqu’à sacrifier sa ville sainte; il est donc plus que jamais résolu à lutter; d’autre part, les Français risquent bien d’être bloqués dans Moscou, puisque déjà, à Smolensk, des Cosaques coupent la route du retour. Napoléon décide alors la retraite. Celle-ci va conduire les Russes jusqu’à Paris et entraîner la chute de l’Empire. «Pour la première fois, comme l’a écrit Victor Hugo, l’Aigle baisse la tête.»
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