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    La journée des Barricades 12 mai 1588

     «Ville ingrate...!»

     

    Le 13 mai 1588, Henri III, avec ses courtisans et ses conseillers demeurés fidèles, s’éloigne de Paris couvert de barricades. Il est plein d’amertume face au soulèvement populaire qui lui ravit sa capitale. Comment s’est produit ce divorce entre Paris et le gouvernement monarchique? Les origines sont à la fois lointaines et proches: d’une part, la politique modé­rée du monarque qui s’efforce de main­tenir un certain équilibre entre les for­ces religieuses; de l’autre, l’importance croissante prise par le mouvement ligueur dans Paris; les prédicateurs font rage dans les chaires; l’exécution, en Angleterre, de Marie Stuart est exploitée en faveur du catholicisme par la duches­se de Montpensier, sœur d’Henri de Guise. En «l’heureuse journée Saint- Séverin» où trois prédicateurs sont libé­rés par la foule, la Ligue prend cons­cience de sa force. Le mécanisme de la révolte qui couve est déclenché par l’arrivée du duc de Guise qui pénètre dans Paris malgré la défense royale et se rend au Louvre où la reine mère s’entremet. Henri III fait rentrer dans Paris gardes-françaises et troupes suisses qui, à la place de la mili­ce bourgeoise qui s’est retirée, occupent les points stratégiques. L’alarme est donnée dans Paris: le quartier de l’Uni- versité, le plus ardent, s’agite le premier; Boucher prêche la guerre sainte aux écoliers. Paris se croit menacé d’une exécution. Le soulèvement devient géné­ral: le 12 mai, la Cité se couvre de barri­cades, l’université et la ville de même. Les troupes sont bloquées, puis capitu­lent devant l’offensive des bourgeois. Une échauffourée survient. Guise, sans armes ni cuirasse, apaise les troubles. On crie: «Vive Guise!» Le lendemain, le roi profite d’une promenade aux Tuile­ries pour quitter le Louvre que les émeu- tiers s’apprêtent à investir; il se rend à Chartres. Les conséquences de cette rupture entre le roi et sa capitale sont importantes: Guise prend le pouvoir à Paris et main­tient l’ordre; il occupe la Bastille, l’Arse- nal et le château de Vincennes; une nou­velle municipalité est élue et se met en relation avec les «bonnes villes» du royaume. Une délégation des corps constitués est envoyée chez le roi pour le gagner à l’ordre nouveau. Henri III, résolu ou secret, cède et signe à Rouen l’édit sur l’Union de ses sujets catholi­ques, enregistré à Paris le 21 juillet. Il y réitère le serment prêté à son sacre de bannir du royaume toutes les hérésies, accorde l’amnistie pour les faits des 12 et 13 mai, maintient dans leurs charges les élus de la révolution. Il confère au duc de Guise le titre de lieutenant géné­ral. Concessions d’un moment face à l’insurrection populaire: dans le silence, le roi humilié prépare sa revanche.


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  • Les croisades XIe-XIIIe siècle

    Un idéal qui fait long feu

    Les Arabes ont été chassés de Sicile et commencent à être refoulés en Espagne quand, au concile de Clermont, en novembre 1095, le pape Urbain II, un Français, appelle les chrétiens à aller enlever Jérusalem aux infidèles: c’est le début des croisades, pèlerinages armés et justes guerres menées pour Dieu. Le pape espère en même temps secourir l’Empire byzantin menacé par les Turcs et accroître son propre prestige face à l’empereur germanique qui refuse la ré­forme de l’Eglise. On compte sur une expédition aristocra­tique; mais des foules se lèvent à l’appel de prédicateurs comme Pierre l’Ermite: c’est la croisade populaire qui, fanatique et mal organisée, atteint à peine les rives de l’Asie Mineure. La croisade des barons a plus de succès. Les chevaliers, des Français en majorité, après trois années d’épreuves, finissent par s’empa­rer de Jérusalem le 15 juillet 1099. La conquête s’étend ensuite et donne nais­sance aux Etats latins d’Orient: royau­me de Jérusalem, principautés d’An- tioche et d’Edesse, comté de Tripoli. Mais, peu à peu, les musulmans s’unis­sent pour faire face aux «Francs». En 1144, ils reprennent Edesse. Le pape charge alors saint Bernard de prêcher la deuxième croisade; celle-ci, conduite par le roi de France Louis VII et l’empereur d’Allemagne Conrad III, échoue devant Damas en 1148. En 1187, le grand chef arabe Saladin écrase les Francs à Hattin et reprend Jérusalem. Une troisième croisade s’organise alors; mais la princi­pale armée, conduite par l’empereur Frédéric Barberousse, se désorganise à la mort de son chef. Quant aux rois de France et d’Angleterre, Philippe Augus­te et Richard Cœur de Lion, leur rivalité politique les empêche de remporter des succès décisifs. Aussi met-on sur pied une nouvelle expédition. Mais les croi­sés, incapables de payer aux Vénitiens la somme due pour la traversée, doivent accepter d’aller prendre une ville con­currente de Venise; puis ils interviennent à Constantinople dans les querelles dynastiques: ils finissent par prendre la capitale en janvier 1204, donnant nais­sance, pour un peu plus d’un demi- siècle, à l’Empire latin de Constanti­nople. La cinquième croisade, de 1217 à 1221, dirigée contre l’Egypte pour faire diver­sion, n’obtient aucun succès. La sixième croisade est dirigée par Fré­déric II, empereur d’Allemagne et roi de Sicile, alors excommunié. Tolérant, il s'entend avec le sultan d’Egypte, en 1229, pour que musulmans et chrétiens puissent aller librement à Jérusalem; la croisade de 1239 obtient quelques autres avantages, vite perdus. Quand l’accès à Jérusalem devient de nouveau difficile, Saint Louis, en 1248, organise une expédition contre l’Egypte; mais il est vaincu et fait prisonnier. Libéré, il repart pour la huitième et dernière croi­sade, qui échoue en 1270 devant Tunis.


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  • Les chouans 1793-1804

    Révolte dans l'Ouest

    En mars 1793, l’insurrection royaliste, dite «guerre de Vendée», se dresse contre la République, affectant le Poi­tou, l’Anjou, le bas Maine et la Bretagne du Sud; les persécutions contre les prê­tres réfractaires, la levée de 300000 hommes décrétée par la Convention en sont les causes directes. Animés par leurs chefs Cadoudal, La Rochejaque- lein, Stofflet, Charette, les Vendéens contrôlent, après neuf mois de combats, la région comprise entre la Loire et la Sèvre Niortaise, de l’Atlantique à Saumur. Après les terribles représailles de la Ter­reur, la guerre change de caractère et devient une sorte de guérilla faite d'embuscades tendues aux soldats répu­blicains, les Bleus: c’est la guerre des chouans, ou chouannerie, menée par des paysans commandés par quelques offi­ciers nobles; la chouannerie n’engagera jamais, comme la «Vendée militaire» qui l’a précédée, de véritables batailles rangées. Après la chute de Robespierre, les «thermidoriens», soucieux d’éteindre enfin les passions, recherchent la paix; Guermeur, député du Finistère, et le gé­néral Hoche traitent avec les insurgés: en 1795, la Convention vote une loi d’amnistie et rétablit officiellement la liberté des cultes. Mais, en juin, des émi­grés tentent un débarquement à Quibe- ron avec l’appui de l’Angleterre, rallu­mant ainsi les hostilités; mais ils échouent et les prisonniers sont exécu­tés. La chouannerie semble alors en voie d’extinction. En février 1796, Stofflet est pris et fusillé; un mois plus tard, Charet­te subit le même sort; quant à La Rochejaquelein, il a été tué en mars 1794. Terrés en Bretagne, les derniers insurgés déposent les armes en 1797. En 1799, Cadoudal tente sans succès un dernier soulèvement; il finira ses jours sur l’échafaud à la suite d’un complot contre Bonaparte, en 1804. Depuis lors, la paix civile est définitivement rétablie.


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  • L’affaire des placards 16-18 octobre 1534

    Une provocation ou un défi..

    Le développement de la Réforme fran­çaise et la lutte de la monarchie contre les adversaires de l’Eglise de Rome ne se sont pas faits de façon continue. Au contraire, à l’origine, on a pu croire à une certaine sympathie de la part du roi, conseillé par sa sœur Marguerite d’Angoulême, reine de Navarre, à l’égard du renouveau évangélique, mal­gré le concordat de Bologne (1516) qui plaçait l’Eglise de France dans la main du monarque. En 1534 s’ouvrent des négociations de paix en vue d’un rap­prochement des Eglises. Mais dans la nuit du 17 au 18 octobre 1534, des «escripteaux» sont affichés dans les carrefours à Paris, dans les vil­les principales, Blois, Orléans, Rouen, Tours, et jusqu’à Amboise, sur les por­tes de la chambre du roi. Le titre? «Les articles véritables sur les horribles, grands et importables abus de la messe papale, inventée directement contre la saincte Cène de Nostre Seigneur.» Le texte, attribué à Antoine Marcourt, pasteur de Neuchâtel, est d’une grande violence: il condamne «cette pompeuse et orgueil­leuse messe papale... séduction du peu­ple». La prédication de l’Evangile est rejetée et empêchée, «le temps est occu­pé en sonneries, hurlements, chanteries, vaines cérémonies, luminaires, encense­ment, déguisement et telles manières de sorcelleries». D’autres placards furent affichés à Paris le 13 janvier 1535, «pa­reils aux premiers ou plus exécrables». Défi ou provocation? œuvre d’extrémis­tes soucieux de faire échouer les tentati­ves de conciliation au moment même où elles semblaient réussir? Stupeur et colè­re chez les catholiques, indignation des corps constitués qui incriminent la man­suétude royale. La répression s’abat, fé­roce. Libraires et imprimeurs sont pour­suivis, pêle-mêle avec des hommes de loi, des marchands, des artisans, des gens d’Eglise, au hasard des clameurs de la rue, des dénonciations, des propos imprudents. Le 13 novembre, un paraly­tique, Milon, est conduit au bûcher; le lendemain, un riche drapier, Jean Du Bourg: première fournée, œuvre du par­lement. En décembre, blessé dans sa dignité, déçu dans ses espérances, le roi prend le relais et se montre impitoyable: «On ne scauroit me faire chose plus agréable que de contynuer en sorte que cette mauldicte et abominable secte ne puisse prendre pied ni racine en mon royaulme.» Les dés sont jetés, les potences sont dressées, les bûchers flambent, les pro­cessions se multiplient. La politique de rapprochement avec les princes protes­tants est abandonnée pour un temps. La barbarie déchaînée, sacrifiant à l’unité de la foi les tenants de la religion nouvel­le, multiplie les martyrs, indigne l’Euro­pe, creuse le fossé qui va conduire aux guerres de religion.


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    Charette 1763-1796

    Le desperado du roi

    Le soulèvement des Vendéens contre la Convention avait éclaté en divers points lorsque, le 14 mars 1793, les paysans du canton de Machecoul vinrent prier le chevalier François-Athanase de Charet­te de la Contrie de se mettre à leur tête. Né à Couffé, près d’Ancenis, le 21 avril 1763, cet officier de marine, catholique et royaliste, avait donné sa démission en 1790. Après un court séjour à Coblence (où les manœuvres des émigrés l’avaient fort déçu), il avait participé, le 10 août, à la défense des Tuileries avant de rega­gner son domaine familial, d’où il repar­tit avec son fusil. Il allait bientôt devenir un héros de légende. D’un caractère ombrageux, jaloux de son autorité, brave jusqu’à la témérité mais impla­cable pour ses ennemis, il connaissait l’art d’entraîner ses hommes. Au début, il commanda à des bandes mal armées, mal organisées, et vit alter­ner succès et revers. Bien que ne s’étant pas joint à «l’armée catholique et roya­le», il prit part aux sièges de Nantes, puis de Luçon: ce furent des échecs. Mais avec d’Elbée, Lescure et Bon- champs, il vainquit les «Mayençais» de Kléber à Torfou (19 septembre 1793). Cependant, la discorde se mit entre les chefs, et Charette se retira en basse Vendée où il continua la guérilla. Il réus­sit en particulier à s’emparer de Noir- moutier (qui devait être repris peu après). Il ne participa donc pas à la fameuse marche vendéenne au nord de la Loire, mais lutta pied à pied contre les «colonnes infernales» de Turreau qui ravageaient le pays. Traqué par les Bleus, il errait de place en place avec ses bandes, disparaissant au bon moment, surgissant là où on ne l’attendait pas. Malgré quelques succès, il vit fondre ses effectifs et unit ses forces à celles de Stofflet, ce qui n’empêcha pas les deux hommes de subir des défaites. Après le rappel de Turreau et les procla­mations conciliantes de Hoche, Charet­te accepta de négocier. Le 17 février 1795, il signa avec le général Canclaux le traité de La Jaunaye. Un mois plus tard, Stofflet se soumettait à son tour. La guerre de Vendée n’était pourtant pas terminée. En juin 1795, Charette reprit le combat (différentes explications ont été données de cette volte-face) et se vit nommer par Louis XVIII lieutenant général de l’armée royale, mais le dé­sastre des émigrés à Quiberon affaiblit ses positions. Il espérait que le comte d'Artois débarquerait en Vendée. Sa colère fut grande lorsque le prince, arri­vé à l’île d’Yeu, repartit sans avoir mis le pied sur le continent. Charette continua la lutte, mais sans succès. Cerné par les Bleus, il fut blessé et capturé. On le con­duisit à Nantes où il fut fusillé le 29 mars 1796.


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