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Le sabordage de la flotte de Toulon 27 novembre 1942
Un suicide honorable
Dès novembre 1942, le débarquement d’Afrique du Nord et le ralliement de l’A.-O.F. à la France libre enlèvent à Vichy ses derniers atouts et accentuent la pression allemande sur l’Etat français. Hitler somme le gouvernement Laval de déclarer la guerre à la Grande- Bretagne et aux Etats-Unis, faute de quoi «l’armistice pourrait être rompu et la France, administrée comme la Pologne». Vichy n’a plus qu’une force: la flotte. Celle-ci est rassemblée à Toulon; elle compte vingt bâtiments de haute mer: un cuirassé, un porte-avions, cinq croiseurs, trois torpilleurs et dix contre- torpilleurs, placés sous le commandement de l’amiral Jean de Laborde; à cela s’ajoutent 135 navires de divers tonnages, commandés par l’amiral Marquis. Le secrétaire d’Etat à la Marine, l’amiral Auphan, a donné les consignes suivantes: la flotte doit s’opposer à toute prise de contrôle par des troupes étrangères... ou se saborder. Par l’entremise du représentant local de la Commission d’armistice, von Ruault- Frapart, l’amiral Marquis cherche à négocier la neutralité de la flotte; Hitler accepte, tout en précisant que les bâtiments et la place de Toulon devront être défendus à tout prix contre les Anglo- Saxons; il concède 20 bataillons pour renforcer la défense, ainsi que le réarmement d’une trentaine de navires. A partir du 17 novembre, les Allemands intensifient leur pression sur Toulon; le 18, Auphan démissionne; il est remplacé par l’amiral Abrial; le 26 au soir, Laborde apprend que le fort Lamalque vient d’être investi par les chars allemands et que Marquis est prisonnier. Laborde ordonne aussitôt de réveiller l’équipage du cuirassé Strasbourg, d’allumer les feux et de couper les communications du navire avec la terre; il appelle ensuite Dornon, remplaçant de Marquis, et lui dit: «Nous allons être obligés de saborder; prévenez-moi dès (que les Allemands) chercheront à forcer les portes de l’arsenal.» C’est ce qui se produit cinq minutes plus tard; Laborde commande alors le sabordage, c’est-à-dire l’ouverture des prises d’eau et la destruction des pièces essentielles. Les Allemands, ignorant l’existence de téléphones secrets, sont ainsi bernés. La Marine a sauvé son honneur; Toulon a condamné Mers el-Kébir en démontrant que les milieux français les plus hostiles à l’Angleterre n’étaient pas pour autant au service de l’Allemagne. Le monde accueille la nouvelle du sabordage avec une respectueuse émotion; la presse américaine évoque «la gloire de Toulon»; gloire bien coûteuse, hélas! puisque l’«acier victorieux» est retourné à la ferraille et que la France, entièrement occupée, est désormais tombée au dernier degré de l’impuissance.
Tags : toulon, allemands, flotte, l’amiral, sabordage, 1942
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1971