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    Les prisonniers - 1939-1945

    «J’attendrai...»

     

     «Les membres des forces armées fran­çaises qui sont prisonniers de guerre de l’armée allemande resteront prisonniers de guerre jusqu’à la conclusion de la paix» (convention d'armistice du 22 juin 1940. art. 20). Ils étaient alors environ 1900000, capturés depuis le 10 mai dans une débâcle militaire sans précé­dent, parqués en France dans des camps improvisés dits Frontstalags. Dans les semaines qui suivent le cessez-le-feu, ils prennent le chemin de l’Allemagne pour être transformés en Kriegsgefangenen régulièrement internés dans l'un des 14 Oflags réservés aux officiers ou des 56 Stalags pour sous-officiers et soldats. Très vite, les 75 000 Alsaciens et Lor­rains, «réintégrés» dans la nationalité allemande, sont libérés, puis vient le tour du personnel du service de santé, des grands blessés, des anciens combat­tants de 1914-1918 non officiers. Enfin, des «congés de captivité» sont accordés à certaines catégories. De 1940 à 1944, près de 430000 prisonniers regagnent ainsi leurs foyers. Les conditions de captivité diffèrent selon les camps. Au nombre d’une cen­taine, les généraux et amiraux détenus dans la forteresse de Kônigstein ont des conditions de confort acceptables. Mais les 20000 officiers — les deux tiers des cadres d’active et de réserve — sont dans des camps presque identiques à ceux des soldats. Le Stalag habituel est composé de baraques prévues chacune pour 200 hommes, disposant de châlits à trois niveaux; il est entouré d’une double enceinte de barbelés dominée par  des miradors où veillent des sentinelles armées de mitrailleuses et dotées de pro­jecteurs pour la nuit. Le régime intérieur est strict mais, en règle générale, confor­me aux conventions de Genève, et si l’ordinaire est frugal, il peut être amélio­ré par les colis venus de France. Les camps deviennent un monde à part où l’on s’efforce d'organiser le «temps de la longue patience», où les activités musicales, théâtrales, sportives, littérai­res, les discussions entre membres des «cercles Pétain» et gaullistes, le bricola­ge et les parties de cartes ne peuvent dis­siper l’ennui. Pour y échapper, beau­coup choisissent le départ en comman­do de travail dans les fermes, les usines ou les chantiers de construction. En 1945, ils sont 625 000 ainsi insérés dans l’économie allemande. Mais le rêve de chaque prisonnier est l’évasion malgré les risques: le cachot ou le camp de représailles de Rawa-Ruska pour les ré­cidivistes. Les derniers mois seront les plus durs. Aux déplacements des camps devant l’avance des Alliés et à l’aggra­vation des restrictions alimentaires s'ajoutent les bombardements de l’avia­tion alliée: 24 600 prisonniers trouvent la mort, soit autant que durant les quatre années précédentes.


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  • Les bombardements de Paris - 1918

    33 raids aériens, 350 obus de 110,1043 victimes 

    Au début de l’année 1918, Pétat-major allemand doit frapper fort et vite, car le temps travaille contre lui: parallèlement à leurs quatre grandes offensives, les Allemands vont s’efforcer de bombarder Paris par avions ou à l’aide de pièces à longue portée, afin d’entamer le moral de l’arrière. La dernière attaque aérienne sur la capi­tale remonte au 27 juillet 1917. Dans la nuit du 30 au 31 janvier 1918, les Parisiens reçoivent la première visite des nouveaux bombardiers allemands, les «Gotha». En une demi-heure, ceux-ci font 259 victimes, dont 61 tués. Ces bombardiers transportent 600 kg de bombes pesant de 50 à 300 kg. Toute­fois, les bombes les plus employées sont celles de 100 kg. Les raids des «Gotha» sur Paris sont surtout nombreux à partir de mars 1918. Dans la nuit du 11 au 12, le ministère de la Guerre est touché; on dénombre 103 tués. Au cours de l’année 1918, 33 raids ont lieu sur l’aggloméra­tion parisienne, faisant 787 victimes. Le dernier bombardement est celui du 16 septembre. Le 23 mars 1918, les Parisiens décou­vrent une nouvelle menace: «L’ennemi a tiré sur Paris avec une pièce à longue portée. Depuis 8 heures du matin, de quart d’heure en quart d’heure, des obus de 240 ont atteint la capitale et la ban­lieue. 11 y a une dizaine de morts et une quinzaine de blessés.» Quelques jours plus tard, un obus tombe sur l’église Saint-Gervais, pendant l'office du ven­dredi saint. Ces bombardements sont le fait d’une batterie de canons de 210 mm, conçus chez Krupp, à Essen. Après une expéri­mentation à Cuxhaven, en direction de la mer, ces canons, baptisés «grosses Bertha», du nom de la fille de l’industriel allemand, sont installés sur des socles de 50 m3 de béton, dans les bois du Mont- de-Joie, entre Couvron et Crépy-en- Laonnois, à 120 km au nord de Paris. La batterie compte trois pièces distantes les unes des autres de 800 à 900 m. Elle est reliée par un épi à la voie ferrée Laon-La Fère. Le tube, long de 34 m, doit être changé tous les 65 coups. Il s’agrandit progressivement, ce qui né­cessite l’augmentation du volume des obus: 210 mm pour l’obus N° 1, 235 mm pour l’obus N° 65. Grâce à des informations émanant d’observations aériennes et d’agents locaux, une des pièces est repérée trente heures après le premier coup de canon; elle est détruite par l’artillerie française, le 27 mars. Début juin, après la victoire allemande du Chemin des Dames, une batterie est installée à proximité de Fère- en-Tardenois, à 80 km de Paris. Chas­sée par la contre-offensive du 18 juillet, elle est expédiée à Beaumont-en-Beine, dans le bois de Corbie, à 110 km de la capitale. Le 9 août, à 14 heures, «Bertha» tire son dernier coup; elle est rapatriée en Allemagne et les Alliés n’en retrouve­ront jamais la trace.


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    Le drame des Pieds-Noirs - 1954-1962

    Le temps des déracinés

    L’exode des Pieds-Noirs est un des épi­sodes les plus controversés de l’histoire franco-algérienne. «Nous avons été (traités) tour à tour de pionniers coura­geux... de fascistes, d’assassins, de colo­nialistes...», écrit F. Dessaigne, une rapatriée. Alors que pour Ch. Ageron, «les Européens d’Algérie furent toujours unanimes dans leur hostilité à toute forme de politique libérale envers les musulmans». Du début de la guerre d’Algérie (1er novembre 1954) à fin 1961, on a déjà enregistré des départs d’Européens, mais en nombre négligeable (180000 environ). Ils s’expliquent par les atta­ques nocturnes du FLN, les fermes incendiées, les routes coupées, les ponts dynamités... Mais c’est à partir du 13 mai 1958 que la situation commence réellement à se dégrader pour les Pieds- Noirs, en raison du malentendu avec la métropole. Les événements se précipi­tent: proclamation du droit à l’autodé­termination (16 septembre 1959) par le général de Gaulle; semaine des barrica­des (janvier I960), organisée par le FNF d’Ortiz et de Susini; pourparlers avortés de Melun (juillet 1960). Le réfé­rendum du 8 janvier 1961 sonne le glas de l’Algérie française: 69% de «oui», essentiellement musulmans, en Algérie; 75%, en métropole. Les Pieds-Noirs, se jugeant trahis, soutiennent dans leur grande majorité les généraux factieux du 21 avril (Salan, Challe, Zeller et Jou- haud), puis l’OAS (Organisation armée secrète). Les attentats commis par cette dernière (automne et hiver 1961-1962) ne feront qu’accélérer les négociations entre la France et le GPRA (11-19 fé­vrier 1962) et la signature des accords d’Evian(18 mars 1962). C’est alors que commence le véritable exode, celui qui videra en quelques mois le pays de sa population européenne. En janvier 1962, les émigrants ne sont que 1329; on en comptera 82360 en mai et 328434 en juin: entre le 19 mars, jour du cessez-le-feu, et le 1er juillet, date de l’indépendance, une terreur panique s’empare des Pieds-Noirs. Elle est ali­mentée par des faits objectifs (enlève­ments, attentats malgré le cessez-le-feu), mais, surtout, par des rumeurs effrayan­tes et incontrôlables. La population européenne, qui s’élevait à 1035 000 personnes en 1960, passe à moins de 350000 à fin 1962. C’est seulement le 26 décembre 1961 que la loi Boulin définit le statut des rapatriés. A cette époque, on prévoit le retour de 300000 à 400000 personnes, étalé sur quatre ans! Au problème hu­main s’ajoute un problème économi­que: le 1er octobre 1963, les biens des Pieds-Noirs sont nationalisés. Centres d’accueil (dans le sud de la France) et services administratifs sont rapidement débordés. En Aquitaine et dans le Midi, terres d’élection des agri­culteurs rapatriés, on voit d’un mauvais œil les nouveaux venus. Eux-mêmes, habitués à une main-d’œuvre bon mar­ché, se plaignent de sa cherté.


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    La bataille de Verdun - 1916

    L'enfer des tranchées

    Après la guerre franco-allemande de 1870-1871, Verdun devient le centre d’un véritable camp retranché qui doit son importance stratégique à sa position géographique, à cheval sur la Meuse. A ce titre, la citadelle de Verdun joue un rôle de premier plan dans la défense du Nord-Est. En 1914, elle permet la manœuvre qui conduira à la victoire de la Marne. La vraie bataille de Verdun ne commen­ce que le 21 février 1916 et dure, avec des intermèdes, jusqu’en juillet. Le haut commandement allemand a voulu tenter là une tactique de la «guerre d’usure»: l’attaque est préparée par un tir d’artille­rie d’une intensité inouïe; quelques jours plus tard, l’infanterie allemande, pro­gressant par vagues, s’avance vers les flancs de la colline de Douaumont. Elle essuie la riposte des canons de 75 et des mitrailleuses; les pertes sont lourdes. Mais, le soir du 24, les Allemands ont submergé la deuxième ligne de défense; le lendemain, ils prennent le fort de Douaumont. C’est alors qu’intervient le général Pétain: lançant une contre- attaque, il contrecarre les plans alle­mands. Autour des ruines du fort, la bataille fait rage pendant une semaine. Le 1er mars, l’étreinte ennemie se desser­re, laissant aux Français un répit appré­ciable et leur permettant de recevoir.ren­forts, vivres et munitions. Dès le 6 mars, le champ de bataille s’étend sur la rive gauche du fleuve. Les Allemands s’emparent alors du bois de Cumières, du Mort-Homme et de la cote 304 (24 mai). Le 10 avril, Pétain a assuré qu’«on les aura!»; mais il ren­contre l’opposition de Joffre qui veut ré­server les forces françaises pour l’offen­sive de la Somme. Le généralissime dé­place Pétain au QG des armées du centre et confie Verdun au général Nivelle; le général Mangin cherche vai­nement à reprendre Douaumont; les Alle­mands s’emparent du fort de Vaux (7 juin). Ils attaquent encore le 21 juin et prennent Thiaumont, Fleury et les abords de Froideterre. Mais la progres­sion allemande atteint sa limite: le 4 juin, Broussilov a commencé son offen­sive en Volhynie, et, en juillet, débute celle de la Somme. Le 12 juillet, près de Souville, se déroule la dernière attaque allemande avant la contre-offensive. Douaumont est reconquis le 24 octobre, Vaux en novembre, la crête du Poivre le 18 décembre. L’«enfer de Verdun» a fait environ 335 000 morts parmi les Allemands et 360000 parmi les Français, y compris les «mutinés» fusillés pour l’exemple.


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  • Le traité de Neuilly - 1919

    La Bulgarie perd la Macédoine

    Le 5 octobre 1915, séduite par les suc­cès des Empires centraux sur le front russe, la Bulgarie entre en guerre à leurs côtés; on lui promet en échange une grande partie de la Macédoine.

     

    La Serbie se trouve gravement menacée; pour venir en aide à leur Alliée, la France et la Grande-Bretagne décident d’envoyer à Salonique un corps expédi­tionnaire de 80000 hommes; mais cette armée est stoppée par les Bulgares. En juin 1917, la Grèce intervient à son tour, aux côtés des Alliés; ceux-ci dispo­sent alors d’une masse de 550000 hom­mes, où se côtoient Français, Britanni­ques, Italiens, Serbes et Grecs; ils atta­quent le 15 septembre 1918. Le front est aussitôt percé: les Bulgares battent en retraite et, le 29 septembre, doivent signer un armistice. Le 27 novembre 1919, à Neuilly-sur- Seine, le traité de paix est conclu: il est dur pour la Bulgarie, considérée comme une des responsables de la guerre; cependant, le chef du gouvernement de Sofia, Stambolijski, en accepte les clau­ses. La Bulgarie cède à la Grèce la Thrace occidentale, avec le port de Dedeagatch (Alexandroupolis): elle perd ainsi son accès à la mer Egée; elle abandonne la Dobroudja à la Rouma­nie; enfin, les districts macédoniens de Strumica, Tsaribrod (Dimitrovgrad), Timok (Zajeôar) et Bosilegrad (Bosilj- grad) passent à la nouvelle Yougoslavie. Des territoires ethniquement bulgares échappent ainsi à la mère patrie et Sofia n’est plus qu’à 30 km de la frontière. En outre, la Bulgarie doit réduire son armée à 20000 hommes, ses forces de police à 13 000 hommes et ses douaniers à 3000 hommes; elle doit verser 90 millions de livres à titre de réparations. Les Bulgares ressentent amèrement la perte de la Macédoine qu’ils ont acquise par le traité de San Stefano, après des siècles de luttes contre les Serbes; 220000 Macédoniens quittent leur patrie livrée aux Yougoslaves et se réfu­gient en Bulgarie; en 1925, 100000 d’entre eux n’auront pas encore retrouvé un toit. Pendant quelques années, la question macédonienne agite la péninsu­le des Balkans, éternelle poudrière de l’Europe; un groupement de révolution­naires macédoniens, l’ORIM, fomente presque chaque jour des attentats, entraînant des représailles yougoslaves. Après 1926, grâce aux ressources d’un emprunt et à l’aide de la SDN, on peut réinstaller 400000 Bulgares rapatriés de Thrace et de Macédoine. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Bulgarie, alliée de l’Allemagne, récupère la Macédoine, la Thrace et la Dobroud­ja méridionale; mais, en 1945, la paix la ramène à ses limites de Neuilly.


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