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    Charette 1763-1796

    Le desperado du roi

    Le soulèvement des Vendéens contre la Convention avait éclaté en divers points lorsque, le 14 mars 1793, les paysans du canton de Machecoul vinrent prier le chevalier François-Athanase de Charet­te de la Contrie de se mettre à leur tête. Né à Couffé, près d’Ancenis, le 21 avril 1763, cet officier de marine, catholique et royaliste, avait donné sa démission en 1790. Après un court séjour à Coblence (où les manœuvres des émigrés l’avaient fort déçu), il avait participé, le 10 août, à la défense des Tuileries avant de rega­gner son domaine familial, d’où il repar­tit avec son fusil. Il allait bientôt devenir un héros de légende. D’un caractère ombrageux, jaloux de son autorité, brave jusqu’à la témérité mais impla­cable pour ses ennemis, il connaissait l’art d’entraîner ses hommes. Au début, il commanda à des bandes mal armées, mal organisées, et vit alter­ner succès et revers. Bien que ne s’étant pas joint à «l’armée catholique et roya­le», il prit part aux sièges de Nantes, puis de Luçon: ce furent des échecs. Mais avec d’Elbée, Lescure et Bon- champs, il vainquit les «Mayençais» de Kléber à Torfou (19 septembre 1793). Cependant, la discorde se mit entre les chefs, et Charette se retira en basse Vendée où il continua la guérilla. Il réus­sit en particulier à s’emparer de Noir- moutier (qui devait être repris peu après). Il ne participa donc pas à la fameuse marche vendéenne au nord de la Loire, mais lutta pied à pied contre les «colonnes infernales» de Turreau qui ravageaient le pays. Traqué par les Bleus, il errait de place en place avec ses bandes, disparaissant au bon moment, surgissant là où on ne l’attendait pas. Malgré quelques succès, il vit fondre ses effectifs et unit ses forces à celles de Stofflet, ce qui n’empêcha pas les deux hommes de subir des défaites. Après le rappel de Turreau et les procla­mations conciliantes de Hoche, Charet­te accepta de négocier. Le 17 février 1795, il signa avec le général Canclaux le traité de La Jaunaye. Un mois plus tard, Stofflet se soumettait à son tour. La guerre de Vendée n’était pourtant pas terminée. En juin 1795, Charette reprit le combat (différentes explications ont été données de cette volte-face) et se vit nommer par Louis XVIII lieutenant général de l’armée royale, mais le dé­sastre des émigrés à Quiberon affaiblit ses positions. Il espérait que le comte d'Artois débarquerait en Vendée. Sa colère fut grande lorsque le prince, arri­vé à l’île d’Yeu, repartit sans avoir mis le pied sur le continent. Charette continua la lutte, mais sans succès. Cerné par les Bleus, il fut blessé et capturé. On le con­duisit à Nantes où il fut fusillé le 29 mars 1796.


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    La garde nationale 1789-1871

    Une armée de civils

    Le 13 juillet 1789, le bruit court que des troupes étrangères sont prêtes à investir Paris. Aussitôt, la population de la ca­pitale se réunit spontanément pour s’armer et résister à toute invasion. Cette légion qui se lève est presque essentiellement bourgeoise. Elle est composée de commerçants, d’indus­triels, d’avocats, de médecins et de magistrats qu’on retrouvera dans les dif­férentes assemblées de la Révolution. On y trouve aussi, mais en minorité, des ouvriers. Au lendemain de la prise de la Bastille, La Fayette prend le commandement de cette garde, appelée officiellement «na­tionale». Organisée comme une armée, elle comporte 800 hommes pour chacun des 60 districts de Paris, soit environ 48000 hommes. Elle est couverte par un état-major et comprend une infanterie, une cavalerie et une artillerie. Son uni­forme est bleu, blanc, rouge, couleurs de la Révolution. La garde nationale prend part à tous les grands événements. C’est elle qui enca­dre le peuple lorsqu’il ramène de Ver­sailles à Paris le roi, la reine et le dau­phin. Comme Paris, les principales villes de province créent des gardes nationales qui participent à la fête de la Fédération, le 14 juillet 1790. Formée surtout de bourgeois modérés, la garde nationale s’oppose au peuple de Paris qui réclame, le 17 juillet 1791, sur le Champ-de-Mars, la déchéance du roi Louis XVI. Il y a une fusillade et de nombreux morts. Pourtant, lors de la journée du 10 août 1792, la garde natio­nale participe à la prise des Tuileries. Lors des journées du 31 mai et du juin, elle soutient les Montagnards contre les Girondins. Après le 9-Thermidor et la chute de Robespierre, la garde nationale com­prend beaucoup d’ennemis de la Révo­lution. Elle soutient les royalistes que Bonaparte écrase le 13-Vendémiaire (5 octobre 1795), sur l’ordre du Directoire. Le futur empereur s’en méfie et réduit ses effectifs. Cependant, la garde nationale se dresse le 30 mars 1814 aux barrières de Clichy et de Neuilly pour tenter d’arrêter les Alliés. Les Bourbons restaurés n’osent pas dis­soudre cette milice bourgeoise dont l’appui peut leur être utile; mais, en 1830, celle-ci soutient la révolution de Juillet et devient, sous Louis-Philippe, l’armée de l’ordre par excellence. En fé­vrier 1848, une bonne partie des gardes nationaux se rangent pourtant parmi les insurgés. Démocratisée sous la seconde République, la garde est étroitement surveillée par le second Empire; à la chute de celui-ci, elle devient une véri­table armée populaire qui se retourne contre le gouvernement lors de la Com­mune. Thiers la dissout alors définitive­ment.


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  • Bonaparte à Arcóle

    La «furia francese»

    Depuis les traités de Bâle, l’Autriche reste, sur le continent, le principal adversaire de la France. Carnot dresse un plan pour l’attaquer à travers l’Alle­magne et l’Italie; l’offensive d’Alle­magne doit être la principale, et celle d’Italie, une simple diversion. Mais la fortune en décidera autrement: les vic­toires décisives surviendront dans la plaine du Pô grâce à un général encore très jeune, mais génial, Napoléon Bona­parte. Ce dernier, les Alpes à peine franchies, entame la série de ses succès: le Pié­mont, puis la Lombardie sont conquis. Mais les Autrichiens s’accrochent à Mantoue, place forte commandant leurs routes d’accès en Italie. Bonaparte l’assiège dès juillet 1796. Repoussés une première fois, les Autrichiens finissent par être bloqués dans la ville; mais le gé­néral hongrois Alvinczy arrive, avec 50000 hommes, sur la rive gauche de l’Adige; ayant essayé en vain de le repousser, Bonaparte feint la retraite, mais, par un savant mouvement tour­nant, revient menacer son ennemi. Il manœuvre sur un terrain marécageux, à 50 km au nord-est de Mantoue. D’une route, un pont mène au bourg d’Arcole; en s’en emparant, Bonaparte peut tour­ner l’ennemi; mais il lui faut franchir le pont qui est très bien défendu. Les Français tentent en vain plusieurs assauts; leurs généraux, comme Auge- reau, n’hésitent pas à s’exposer pour galvaniser la troupe; mais celle-ci reste hésitante face au feu très nourri de l’ennemi. Bonaparte décide à son tour 15 novembre 1796 de payer de sa personne: saisissant un drapeau et bravant la mitraille, il par­vient à le planter sur le pont; électrisés, les soldats le suivent jusqu’au milieu de l’ouvrage; mais la fusillade redouble et l’arrière-garde française recule; l’avant- garde, isolée, est prête à fuir également, mais elle veut sauver son général; sans façon, les soldats le saisissent et l’entraî­nent avec eux; mais il tombe dans le marais et y enfonce jusqu’à mi-corps; immobilisé, il va tomber aux mains des Autrichiens; dans les rangs, un cri s’élè­ve: «En avant pour sauver le général!». Tiré de sa fâcheuse position, Bonaparte rameute ses troupes et attaque de nou­veau; cette fois l’ennemi recule, éva­cuant Arcole. Deux jours plus tard, le novembre 1796, il est entièrement refoulé dans la plaine. Les Autrichiens ont 6000 tués et per­dent 5000 prisonniers. Les Français, beaucoup moins nombreux, instruits et équipés, les ont battus grâce à un géné­ral de 27 ans. Dès ce jour, celui-ci entre dans la légende: la bataille du pont d’Arcole ouvre une des plus prodigieu­ses carrières de l’Histoire.


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    La victoire de Valmy - 20 septembre 1792

    Les Thermopyles de la France

    Après la fuite de la famille royale à Varennes en 1791, certains révolution­naires parlent de destituer Louis XVI et Marie-Antoinette. L’empereur d’Autri­che, Léopold II, s’en inquiète et signe avec la Prusse la déclaration de Pillnitz; celle-ci prétend interdire aux Français de contester le pouvoir et l’autorité du roi. Pareille ingérence dans les affaires intérieures du pays indigne l’Assemblée législative qui songe peu à peu à y ré­pondre par la guerre. Au début de mars 1792, Léopold II meurt. Son fils et successeur, François lance un double ultimatum: les «prin­ces possessionnés d’Alsace», c’est-à-dire les princes allemands ayant des terres sur la rive gauche du Rhin, devront recouvrer leurs droits féodaux abolis par la Révolution française; d’autre part, le comtat Venaissin, possession du Saint-Siège annexée par la France après référendum populaire, devra être rendu au pape. En avril 1792, l’Assemblée législative refuse et déclare la guerre à l’Autriche et à la Prusse. Mais l’armée française, dé­sorganisée, doit reculer en Belgique. En août, cependant, la levée massive d’une armée de jeunes recrues, mal entraînée certes, mais enthousiaste, permet à la France de se ressaisir. Dumouriez et Kellermann, qui la commandent, déci­dent d’arrêter l’invasion du pays dans les défilés de l’Argonne, qui, disent-ils, devront être «les Thermopyles de la France». C’est là, près du village de Valmy, qu’a lieu la bataille décisive. Les deux généraux veulent attirer les armées austro-prussiennes dans les défi­lés et disposer leurs propres troupes sur les hauteurs. Un duel d’artillerie intense, plusieurs fois répété, s’engage; les Fran­çais chargent alors vigoureusement. Avec leurs 100000 hommes, Autri­chiens et Prussiens pensent réduire faci­lement leurs adversaires, inférieurs en nombre. Mais la jeune armée révolution­naire, animée d’un ardent patriotisme, ne cède pas un pouce de terrain, en dépit de la canonnade allemande. Le 20 sep­tembre 1792, le duc de Brunswick, chef des armées coalisées, décide la retraite. Le succès de Valmy va encourager la France et renforcer le prestige de la Ré­volution française, ainsi que l’unité inté­rieure. En effet, le duc de Chartres, futur roi Louis-Philippe Ier, était parmi les combattants, sous l’étendard tricolore. Pour sa part, le grand poète allemand Goethe écrira, parlant des soldats de Valmy: «Ils pourront dire avec fierté: «J’y étais.»


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  • Les débuts du règne de Louis XVI - 1774-1789

    Vers un destin tragique

    Petit-fils de Louis XV, Louis XVI, né le 23 août 1754 à Versailles, n’a pas enco­re 20 ans quand il monte sur le trône en 1774. Le jeune roi ne manque pas de bon sens; il a reçu une instruction géné­rale valable et saura se montrer pieux, bon, charitable, économe des deniers de l’Etat. Ces qualités sont malheureuse­ment gâchées par sa timidité et sa fai­blesse de caractère, aggravées par son inexpérience politique. Au début du rè­gne, il sera encore desservi par son entourage et par l’attitude de la reine Marie-Antoinette, jeune, primesautière, décidée à profiter de l’existence. Dès son avènement, Louis XVI mani­feste le désir passionné de faire le bien de son peuple et de procéder aux réfor­mes nécessaires. Suivant les conseils du vieux Maurepas, il s’entoure d’excellents ministres: Turgot, Malesherbes, Vergennes, le comte de Saint-Germain, dési­reux de procéder à une refonte de l’Etat, de promouvoir la liberté économique, d’atténuer les privilèges en matière fisca­le ou dans l’armée. Malheureusement, le rappel des parlements, exilés par Mau- peou à la fin du règne de Louis XV (1771), se révèle comme une mesure désastreuse. A leur habitude, les Cours souveraines reprennent leur rôle d'oppo­sition. Dès 1776, Turgot et Malesherbes quittent le gouvernement. Le problème essentiel de la monarchie est alors le désarroi des finances, aggra­vé par les dépenses de la guerre d’Amé­rique. Successivement, Necker, Calonne, Loménie de Brienne, après avoir tenté en vain des emprunts, préconisent la réduction des dépenses de la cour et l’égalité devant l’impôt. Ces projets, mal soutenus par Louis XVI, déchaînent l’op­position de la noblesse et du parlement, inquiets pour leurs privilèges et qui n’hé­sitent pas à discréditer la famille royale lors de l’affaire du Collier». En 1788, Louis XVI se décide enfin à réagir. Les édits de Lamoignon réorga­nisent la justice et enlèvent tout pouvoir politique aux parlements. Ces mesures sont à l’origine d’une véritable révolu­tion, celle de nobles décidés au contrôle de la monarchie. Profondément troublé, Louis XVI rend alors aux parlements leurs privilèges et accepte la convoca­tion des états généraux qui, dans l’esprit des opposants, doit sonner le glas de l’absolutisme. Mais, à la veille de leur réunion prévue pour le 1er mai 1789, le débat change de sens. Necker, revenu aux Affaires, a dé­cidé, quelques mois plus tôt, que le tiers aurait autant de représentants que les deux autres ordres réunis. Le conflit n’est plus entre le roi et les privilégiés, mais entre la bourgeoisie et les privilé­giés. Cet antagonisme nouveau offre à Louis XVI l’occasion de jouer une par­tie décisive. Il ne saura pas la saisir.


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