• Berthollet - 1748-1822

    Un pionnier de la science moderne

     

    Berthollet naît en 1748 à Annecy, en Savoie. Il fait des études à Turin, puis à Paris où il rencontre le célèbre médecin Tronchin qui soigne le duc d’Orléans. Grâce à cette protection, Berthollet peut travailler dans les laboratoires du duc, au Palais-Royal. Il se spécialise dans la chimie et fait une découverte capitale en matière de teinture des tissus: l’acide muriatique oxygéné, dont les propriétés décolorantes permettent de faire blan­chir une toile avant de la traiter. Il s’associe au savant Monge et, sous la Révolution française, travaille sur les chlorates et le salpêtre; il découvre ainsi de nouveaux explosifs pour l’armée. Avec Lavoisier, Fourcroy et Guyton de Morveau, il contribue à édifier une nomenclature chimique rationnelle. Il énonce les lois dites «de Berthollet» sur la double décomposition des sels, acides et bases, dans son ouvrage, Essai de statique chimique, qui paraît en 1803. Grâce à ses recherches, Berthollet accè­de aux honneurs: professeur à l’Ecole normale, il participe à la création de l’Ecole polytechnique, où il enseigne la chimie. Devenu membre de l’institut, il est chargé par Bonaparte de diriger la réparation des tableaux réquisitionnés en Italie. Puis, avec Monge, il accompagne Napo­léon Bonaparte en Egypte. En 1798, il travaille sur la soude à partir du carbo­nate découvert en Libye. Il contribue aussi à mettre à jour les vestiges archéo­logiques du canal des deux mers; puis il rentre en France. En 1805, il est administrateur des mon­naies; Napoléon le fait comte d’Empire. Avec Laplace, Gay-Lussac, Arago et Chaptal, Berthollet fonde la Société scientifique d’Arcueil et consacre tous ses revenus à ses recherches scientifi­ques. Mais les malversations de son fils le ruinent. Napoléon, reconnaissant ses services, lui verse une pension. En dépit de la protection de l’Empereur et de son amitié, Berthollet a l’ingrati­tude de voter sa déchéance le 2 avril C’est là l’unique faiblesse de ce grand savant dont les découvertes, avec celles de Lavoisier, annoncent l’essor des sciences au XIXe et au XXe siècle.


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  • Ferdinand de Lesseps - 1805-1894

    L ’homme qui réunit quatre mers

     

    En 1854, Mohammed Saïd devint vice- roi d’Egypte. Il appela aussitôt auprès de lui son ami Lesseps, à qui son père, Méhémet Ali, fondateur de l’Egypte moderne, avait confié son éducation alors que Ferdinand était consul, entre 1831 et 1838, à Alexandrie et au Caire. En novembre, Saïd l’emmena dans le désert et, un soir, au coucher du soleil, tandis que Lesseps lui exposait, avec son esprit visionnaire, le plan du canal de Suez, il lui dit: «Je suis convaincu, j’accepte votre plan, vous pouvez comp­ter sur moi.» Il avait trouvé un but à l’ambition généreuse qu’il avait expri­mée à Lesseps: «Oh! mon ami, je vou­drais illustrer le début de mon règne en accomplissant une chose grande et uti­le!» Le rêve de deux hommes allait se réaliser.  Ferdinand de Lesseps était né le 19 no­vembre 1805 à Versailles d’une vieille famille de diplomates (son père avait été consul en Egypte). Il suivit d’abord la même carrière, à Lisbonne, puis à Tunis. Nommé consul à Alexandrie, il y fut en relation avec les saint-simoniens, auxquels il dut peut-être l’idée d’un canal entre la Méditerranée et la mer Rouge. Après être passé par plusieurs postes, dont Madrid, où il fit la connais­sance des Montijo et de la future impé­ratrice, il fut mis en disponibilité et quit­ta la diplomatie. De retour en Egypte, il commença, en 1855, les premiers tra­vaux d’étude du canal, dont le débouché sur la Méditerranée portera le nom de Port-Saïd. Les difficultés ne manquèrent pas, principalement d’ordre financier, sinon diplomatique, la Turquie, dont dé­pendait politiquement l’Egypte, n’appré­ciant pas une création qui risquait de dé­tourner l’ancien courant commercial établi entre l’Europe et l’Inde par la Syrie, la Mésopotamie et le golfe Persi- que. En Angleterre, Palmerston se mon­trait hostile au projet. Lesseps persévéra et réussit avec l’appui de Napoléon III. L’inauguration du canal, le 17 novem­bre 1869, en présence de l’impératrice Eugénie, fut un succès pour lui et pour la diplomatie française. Elle établissait notre influence sur l’Egypte, devenue un des principaux producteurs de coton en même temps que l’escale indispensable vers l’Extrême-Orient. Le succès encouragea Lesseps à entre­prendre le canal de Panama. Il devint, en 1879, président de la compagnie fon­dée à cette intention. Les difficultés, réelles, furent amplifiées par la spécula­tion et par les scandales parlementaires qui conduisirent la compagnie à la failli­te. Les travaux et le matériel furent rachetés par les Etats-Unis, qui menè­rent à bien la tâche entreprise par Les­seps, dont les plans aboutirent, bien après sa mort (7 décembre 1894), à l’inauguration du canal en 1914.


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  • Saint-Simon - 1760-1825

    Le prophète de l’ère industrielle

     

    L’œuvre de Saint-Simon est riche et multiple. Au-delà des développements que lui apportèrent ses disciples, elle ins­pire les théoriciens socialistes et donne une nouvelle impulsion au capitalisme. Né en 1760, Saint-Simon, grand aristo­crate, a une existence chaotique. Il embrasse la carrière des armes et l’abandonne après avoir participé à la Révolution américaine aux côtés des insurgés. Il voyage, entreprend des affai­res industrielles, se ruine et fait fortune à nouveau en spéculant sur les biens nationaux. Il ne prend pas une part acti­ve à la Révolution française, mais il est emprisonné sous la Terreur. Marié, divorcé, ruiné à nouveau, entretenu par un de ses anciens domestiques, puis par des amis, il vit alors pauvrement, tente même de se suicider et meurt en 1825 au milieu des quelques disciples qui commencent à l’entourer. Selon Saint-Simon, la société doit être réformée, car ce sont les incapables qui se trouvent chargés de diriger les plus capables. Il y a des gens laborieux, industrieux — la classe «industrielle» —, travailleurs de l’agriculture, artisans, commerçants, savants, artistes, ban­quiers, maîtres de forges, fabricants d’armes, etc., et, d’autre part, les inutiles, ceux qui ne font rien, n’entreprennent rien, nobles, gens d’Eglise, fonctionnaires, juges et propriétaires oisifs. Or, le gou­vernement est aux mains de ces incapa­bles qui ne font qu’entraver la multiplica­tion des richesses et exploiter les pauvres. La société nouvelle doit donc être fon­dée sur la capacité, y compris celle du capitaliste dynamique. Le gouverne­ment sera confié aux meilleurs «indus­triels», car ce sont eux les chefs réels du peuple; la multiplication de leurs entre­prises aura pour effet de résorber le chô­mage et d’améliorer le sort des pauvres. Cette réforme de la société doit s’accompagner d’une réforme morale et religieuse dont la nouvelle Eglise cultive­ra la paix universelle. La doctrine de Saint-Simon est dévelop­pée ultérieurement par ses disciples regroupés autour ¿’Enfantin et de Bazard en une véritable secte, qui a ses rites, sa hiérarchie et son couvent. Les saint-simoniens prônent une forme de socialisme, condamnant l’héritage, l’ap­propriation des moyens de produc­tion et l’exploitation de l’homme par l’homme. Ils veulent réaliser une «asso­ciation universelle» où «l’homme, asso­cié à l’homme, exploite le monde livré à sa puissance». Ils doivent se disperser à la suite d’un procès intenté par le pou­voir royal. Ils se consacrent dès lors aux grandes entreprises financières et indus­trielles telles que les chemins de fer, l’ouverture du canal de Suez, la mise en valeur de l’Algérie ou la banque. Les saint-simoniens sont à l’origine d’un nouvel élan économique qui culminera sous le second Empire.


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  • Guillaume Budé - 1467-1540

     

    Budé

     

    Le rénovateur des études grecques

    Né en 1467, fils de Jean Budé, grand audiencier de France, Guillaume fait ses études d’abord à Paris, puis à la faculté de droit d’Orléans. La chasse est son occupation préférée jusqu’au jour où se produit sa «révolution hellène»; il chan­ge d’orientation, se consacre aux lan­gues anciennes et, à 23 ans, aborde toutes les sciences: théologie, jurispru­dence, mathématiques, lettres... vivant exemple de ces humanistes qui, rejetant le passé scolastique, se vouent à l’exalta­tion de l’Antiquité, source de vie et de connaissance. Le grec est sa passion.Il a pour maître Georges Hermonyme de Sparte, qui l’initie à Homère, et comme ami Jean Lascaris, «le plus docte Grec de son temps»; qui lui pro­cure leçons et livres. Jusque-là, le grec était proscrit des étu­des, les moines y voyant «la langue qui enfante toutes les hérésies». En 1529, Budé publie ses savants Commentaires sur la langue grecque qui vont servir de base au Thesaurus graecae linguae d’Henri Estienne.Budé se consacre autant à l’action qu’à l’érudition: comme érudit, outre ses Annotations aux Pandectes où il montre une connaissance de l’Antiquité alors rare chez les jurisconsultes, son traité De asse et partibus ejus révèle en lui le meilleur connaisseur de l’économie des Anciens dans le domaine difficile de l’histoire monétaire. Erasme, qui se brouillera un temps avec Budé, l’appelle tout de même le «prodige de la France». En 1522, Budé dirige la librairie du roi à une époque où le livre est encore rare et coûteux. Homme d’action, Budé sert comme diplomate. Son prestige d’humaniste à l’échelle européenne incite Louis XII puis François Ier à lui confier l’ambassa­de près le Saint-Siège. Très bien reçu à Rome, Budé n’apprécie pourtant guère, dans sa simplicité vertueuse, les intri­gues de la cour. Il sollicite son rappel. Elu prévôt des marchands par la ville de Paris, il obtient que François Ier réalise sa promesse de créer un Collège des lec­teurs royaux. Budé surveille et dirige la mise en place de l’institution avec Las­caris. Il établit la bibliothèque de Fon­tainebleau. Mais ses charges lui pèsent: elles le détournent de ses chères études! Il meurt en août 1540, ayant refusé les obsèques solennelles; il est conduit de nuit au cimetière de Saint-Nicolas-des- Champs, sa paroisse. Sa veuve et quelques-uns de ses enfants partent pour Genève. Catholique intègre, il a censuré les dé­sordres de la cour romaine et les dérè­glements du clergé. Comme seigneur d’Yerres, près de Paris, il a été un bon administrateur. Il s’est montré aussi honnête magistrat. En rénovant les étu­des grecques, il a contribué à la création d’une conscience européenne.


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  • Jacques Lefèvre d’Etaples - Vers 1455-1536

    Le père de l’évangélisme français

    Né à Etaples, dans le diocèse d’Amiens, vers 1455, Jacques Fabri ou Lefèvre fait ses études à Paris où il prend le grade de maître ès arts. Il voyage ensuite dans toute l’Europe, revient à Paris où il enseigne la philosophie au collège du Cardinal-Lemoine jusqu’en 1507, au moment où se produit 1’«appel de Meaux» qui va faire de lui le chef d’une nouvelle école, celle de l’évangélisme, annonciatrice de la Réforme française. A Meaux, Pévêque Briçonnet, venu de Lodève, soutient une nécessaire réforme de l’Eglise; après avoir réformé son abbaye de Saint-Germain-des-Prés, il se met au service d’un retour aux sources de l’Evangile, ne souhaitant qu’une cho­se, «que le Christ triomphe dans cette affaire». De 1521 à 1524, «Monsieur de Meaux» entretient une correspondance avec la sœur du roi, Marguerite d’Angoulême. L’appel de Meaux fait de Lefèvre d’Eta­ples, «petit vieillard» timide et débile dont le nom est salué par toute l’Europe, le chef de la nouvelle école évangélique. A Paris, il domine un groupe d’étudiants et de lettrés passionnés par la culture nouvelle; par ses amis, Budé et Guillau­me Petit, confesseur du roi, il a l’oreille des princes; Erasme l’estime. Il publie son Commentaire sur les épîtres de saint Paul, avec une nouvelle traduction latine (1512 et 1531), les Commentaires sur les Evangiles (Meaux, 1523), une traduction française du Nouveau Testa­ment (Paris, 1525), faite sur la Vulgate et destinée aux fidèles. Ces œuvres sus­citent la colère de la faculté de théologie qui le poursuit jusqu’à Meaux dont il est grand vicaire. En 1525, il doit se réfu­gier à Strasbourg. De retour de Madrid, François Ier le nomme précepteur de Charles, son troisième fils. En 1531, la reine de Navarre l’emmène à Nérac où il passe ses dernières années et où il meurt en 1536. Lefèvre d’Etaples a eu pour principal idéal le retour à PEvangile. Vulgariser les livres saints, en esquisser pour l’élite l’interprétation spirituelle, en traduire pour le peuple le texte vrai, mettre les âmes en contact avec la parole de Dieu, tel est l’objectif de la nouvelle école de l’automne 1521 à la fin de 1524. Il faut faire vite: les idées luthériennes se pro­pagent; si le mouvement n’est dirigé ou contenu, il peut devenir une révolution ou un schisme. De là l’intérêt de l’expé­rience fabriste: elle rencontre l’incom­préhension des autorités; elle demeure catholique mais, rapidement, la poli­tique va déborder la mystique; les inno­vations de Meaux sont condamnées par l’Eglise traditionnelle; la rupture calvi­niste est proche.


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