• Le combat des géants 

    La bataille de Marignan

     

    Depuis Charles VIII, les rois de France tentent île pénétrer en Italie. Mais l’Europe s’oppose à leurs ambitions; en Italie même, ils rencontrent tantôt l'appui, tantôt l’hostilité des puissances locales. En 1495, Charles VIII doit abandonner complètement la péninsule; son successeur, Louis XII, après une nouvelle tentative, ne conserve que le Milanais; mais une puissante coalition, la Sainte Ligue, se forme contre lui; vaincu, il quitte à son tour le pays.

    A peine couronné, son cousin, le jeune et brillant François Ier, veut regagner le terrain perdu; il s’assure l’alliance de Venise et la neutralité de l’Angleterre. Mais le duc de Milan, Maximilien Sfor­za, est protégé par une puissante armée suisse, ' intervenue en Italie sous l’im­pulsion du cardinal de Sion, Matthäus Schiner, adversaire acharné des Fran­çais.

    En août 1515, ayant tourné les Suisses, François Ier débouche en Italie et avan­ce rapidement. Les Confédérés, pris de court, veulent lui vendre leur départ contre une somme de 700000 écus, abandonnant Sforza à son sort. Mais le fougueux Schiner, arrivant avec un ren­fort de 20000 hommes, les en dissuade; ils attaquent alors furieusement les Français.

    L’engagement a lieu à Marignano, au sud-est de Milan, le 13 septembre 1515; le terrain, difficile, resserré entre deux marais, empêche le déploiement de la cavalerie française. Les piquiers suisses enfoncent tout; ni le corps des gendarmes royaux ni la puissante artillerie adverse ne peuvent les arrêter; interrompu par la nuit, le combat reprend dès l’aube du lendemain. François Ier, très courageux, risque plusieurs fois sa vie et son armée est gravement entamée.

    Mais, vers midi, surviennent ses alliés vénitiens qui ont marché toute une nuit; ils prennent les Suisses à revers. Ceux- ci, épuisés, amorcent une retraite en bon ordre; même vaincus, ils gardent une allure redoutable, qu’illustre bien le tableau du peintre Hodler, conservé au musée d’Art et d’Histoire de Genève. Leurs ennemis, à bout de forces, ne peu­vent les poursuivre.

    Cette bataille marque un tournant dans l’histoire européenne; François Ier an­nexe le Milanais, puis amène tous ses adversaires à composition; les Suisses, affaiblis par leurs luttes intestines, renoncent définitivement à la grande politique et signent avec la France une paix perpétuelle.

     

    Faisant allusion à la rançon qu’ils ont failli accepter, un historien du temps note sévèrement: «C’est l’amour de l’argent qui a fait perdre au peuple suis­se l’occasion de devenir le bienfaiteur de toute l’Italie.»


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  • La croisade de l'homme rouge

    Le siège de la Rochelle


    En 1598, l'édit de Nantes avait accordé aux protestants français un statut très libéral; ils jouissaient non seulement de la liberté de conscience et de culte, mais encore d’importants droits politiques et militaires; ils disposaient surtout de gar­nisons et de places fortes.

    Ils formaient donc un «Etat dans l’Etat», ce que ne pouvait souffrir l’in­domptable ministre de Louis XIII, le cardinal de Richelieu; vouant toute son énergie à fortifier l’autorité royale, il n’autorisait personne à la braver ou à s’y opposer.

    Sa politique l’obligeait d’ailleurs à soute­nir les protestants d’Allemagne; pour ré­tablir la balance, il tendait donc à s’op­poser à ceux de France.

    Son premier conflit avec eux éclate en 1625; il est suivi d’une trêve; la guerre se rallume en 1627 et, cette fois, Riche­lieu veut en finir; peu lui importe, d’ail­leurs, les controverses religieuses: c’est la force politique des protestants qu’il veut abattre.

    La Rochelle est la principale forteresse des huguenots; l’occasion est favorable pour l’assiéger, ses habitants étant mo­mentanément isolés.

    Le cardinal conduit personnellement les opérations; la ville est d’abord coupée de l’arrière-pays, sur 12 km, par un soli­de retranchement; puis, pour fermer la rade, on aménage une gigantesque digue: on utilise de gros pieux de bois, entre lesquels on accumule moellons et gravats. C’est un travail énorme que rendent très pénible les remous, les bourrasques, les assauts de la Hotte anglaise venue secourir les Rochelais. En six mois cependant, l’ouvrage est achevé; il compte 1500 m de long et 8 m de large; il résistera à toutes les tempê­tes, contrairement aux prévisions des assiégés.

    Ceux-ci ont également choisi un chef énergique: c’est l’ancien amiral Jean Guiton, qui menace de son poignard quiconque parlerait de se rendre. Pendant plus d’un an, la ville résiste farouchement; le blocus amène la diset­te, puis la famine. Guiton reste inébran­lable: «Pourvu qu’il reste un homme pour fermer les portes, c’est assez», dit- il. Mais la ténacité de Richelieu l’empor­te: le 29 octobre 1628, La Rochelle, affamée, jonchée de cadavres, capitule; sur les 28000 habitants, il ne reste que 5000 survivants.

    L’édit de grâce d’Alès laisse aux protes­tants la liberté de culte et de conscience, mais leur enlève tout autre privilège. Ils se montreront, dès lors, fidèles sujet.


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  • La dernière étape... ou presque 

    La libération de Paris

     

    Du 10 juin 1940 au 25 août 1944, le gouvernement français a passé successi­vement de Tours à Bordeaux, puis à Vichy; aussi la libération de Paris prendra-t-elle valeur de symbole.

    Le 27 mai 1943, le C.N.R. (Conseil national de la Résistance) tient dans la capitale sa première réunion, mais il n’y organise aucune opération importante avant fin juillet 1944, date à laquelle les Américains du général Patton effectuent leur percée décisive d’Avranches. Le C.N.R. décide alors, en accord avec le comité parisien de libération, d’ordon­ner l’insurrection pour le 19 août. Le colonel communiste Rol-Tanguy prend le commandement des F.F.I. (Forces françaises de l’intérieur) qui sont présen­tes dans la ville. Quant aux occupants, ils ont à leur tête le général Dietrich von Choltitz, commandant du Grand-Paris, dont le Q.G. est situé à l’hôtel Meurice. L’opération est précédée, le 15 août, par une grève des agents de police; le 18, c’est la fusillade du pont des Arts; le len­demain se déroule un des épisodes parti­culièrement controversés de cette épo­pée: von Choltitz a prétendu avoir reçu d’Hitler l’ordre de détruire Paris et avoir refusé d’obéir; mais aucun document sé­rieux ne permet de vérifier cette thèse. Quoi qu’il en soit, le 20 août, sur l’inter­vention du consul de Suède Paul Nord- ling, von Choltitz libère les prisonniers politiques, ce qui permet la signature d’une trêve entre les deux camps; le même jour, Charles Luizet, représentant de Gaulle, s’installe à l’Hôtel de Ville. Mais le 21, Rol-Tanguy rompt la trêve et attaque les Allemands, retranchés notamment à l’hôtel Majestic, l’Opéra, la Concorde, la Chambre des députés, l’Ecole militaire et le Luxembourg. Le même jour, de Gaulle rend visite à Eisenhower et tente de le convaincre de marcher sur la capitale. Le généralissi­me refuse énergiquement, puis finit par accepter, à condition que ce soit la 2e division blindée française, commandée par Leclerc, qui se charge de l’opéra­tion; Leclerc parvient, non sans peine, à décider Bradley d’assurer ses arrières à l’aide de la 4e division américaine. Le 22 à minuit, la 2e D. B. passe à l’attaque: à l’ouest, Langlade et ses hommes se dirigent vers Rambouillet, Chevreuse, Châteaufort, Jouy-en-Josas et Villacoublay; au sud, Billotte et Dio passent par Arpajon et Longjumeau. Le 24 au soir, les premiers atteignent le pont de Sèvres; les seconds, la Croix-de- Berny. Leclerc lance un groupe de reconnaissance qui parvient à l’Hôtel de Ville peu avant minuit. Dès ce moment, le bourdon de Notre-Dame se met à sonner: la libération n’est plus qu’une question d’heures. Au matin du 25, les diverses colonnes font leur jonction et, l’après-midi, von Choltitz capitule. Le 26 enfin, de Gaulle descend à pied les Champs-Elysées, acclamé par tout un peuple.

     


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  • « Notre Dame Guesclin!»

    LA BATAILLE DE COCHEREL

     

    Au cours des derniers mois du règne de Jeun le Iton, les rapports entre le roi de

    France et Charles le Mauvais, roi de Navarre et comte d’Evreux, s’enveniment de nouveau. Le 21 novembre 1361, Philippe de Rouvres, duc de Bourgogne, meurt sans laisser d’héritier. Charles le Mauvais et Jean le Bon, parents du défunt, peuvent revendiquer le duché. Le roi, juge et partie, tranche en sa propre faveur et donne la Bour­gogne en apanage à son fils Philippe. Le Navarrais envisage de reprendre l’offen­sive; par-delà le duché de Bourgogne, son ambition s’élève jusqu’à la couronne de France.

    Le dauphin Charles, fils du roi, prend les devants. Il recrute une armée qu’il confie à Bertrand du Guesclin. En avril 1364, ce dernier reçoit l’ordre de s’emparer des places fortes qui permet­tent au Navarrais de contrôler la navi­gation sur la Seine. En une semaine, Mantes, Meulan, Vétheuil, Rosny tom­bent. Au cours de cette semaine, Jean le Bon meurt, laissant le trône au dauphin Charles (8 avril 1364). Quelques jours plus tard arrive en Normandie le millier d’hommes levés en Navarre et en Gas­cogne. Les troupes navarraises veulent empêcher le sacre de Charles V. Pour cela, elles doivent défaire au plus vite l’armée de du Guesclin qui passe sur la rive gauche de l’Eure, à Pont-de- l’Arche. Les Navarrais, renouvelant la tactique de Poitiers, occupent la hauteur de Cocherei et laissent à leurs adversai­res l’initiative de l’attaque.

    Au matin du 16 mai 1364, les Français attaquent aux cris de: «Notre-Dame

    Ouesclinl» Sans attendre les ordres du captai, un routier, Jean Jouel, charge les assaillants avec sa compagnie, entrai nant à sa suite le reste de l’armée navar- raise. Cette charge inopportune amor­cée, les Français rompent. Les Navar­rais se lancent à leur poursuite. Soudain, sur leurs arrières, surgissent, d’un bois où ils se tenaient cachés, 200 vigoureux chevaliers bretons. Les Français arrê­tent leur repli et font face. Pour les Navarrais, coincés entre le gros des troupes de du Guesclin et un corps d’éli­te, la bataille est désormais perdue. De nombreux Navarrais jonchent le champ de bataille, dont le téméraire routier Jean Jouel. Le droit de rançon ne sera pas accordé aux prisonniers français (les Gascons ne sont pas considérés comme français). Traîtres à leur roi, ils seront décapités. Trois jours après la victoire de Cocherel, Charles V est cou­ronné à Reims.

     

    Malgré une poussée de du Guesclin au cœur du Cotentin, Charles le Mauvais demeure maître de la Normandie occi­dentale et de sa capitale Evreux. Par contre, les places assurant le contrôle de la navigation sur la Seine, en particulier Mantes et Meulan, restent aux mains du nouveau roi, ainsi que le comté de Lon- gueville, remis à du Guesclin. Cet état de fait est sanctionné par le traité d’Avi­gnon (mars 1365).


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  • une boucherie inutile

    LA BATAILLE D’EYLAU

     

    Fin 1806, Napoléon u vaincu à Iéna et à Auersledt la quatrième coalition formée par la Prusse, la Russie et l’Angleterre. Au début de 1807, il doit faire face à la Russie restée invaincue. Installé à Var­sovie, l’Empereur peut évaluer sur place la situation des deux armées.

    Son plan est d’empêcher les Russes de rejoindre Königsberg, chef-lieu de la Prusse-Orientale. Le 6 février 1807 au matin, ses corps d’infanterie et de cava­lerie, commandés par les maréchaux Soult, Murât, Davout et Ney, repous­sent une série d’attaques russes. Pen­dant la nuit du 6 au 7, les Russes com­mencent à investir Eylau, place straté­gique importante, qui commande les routes de Königsberg et de Friedland.

    Le rapport des forces est défavorable à l’armée française; Bennigsen, comman­dant des troupes russes, dispose de 80000 hommes et Napoléon n’en peut aligner que 55 000. Pour compenser cette infériorité numérique, l’Empereur cherche à encercler l’ennemi. Le 7 fé­vrier, après de durs combats, Murât et Soult s’emparent d’Eylau ainsi que du château et du cimetière.

    Au matin du 8 s’élève une tempête de neige; la bourrasque empêche toute visi­bilité; les Russes en profitent pour anéantir à coups de boulets les deux corps d’armée d’Augereau qui station­nent dans le cimetière d’Eylau. L’armée russe pénètre à nouveau dans la ville; Murât doit lancer plusieurs fois sa cava­lerie pour entamer l’infanterie ennemie; il s’ensuit une mêlée confuse qui dégénè­re vite en une véritable boucherie. Finalement, l’acharnement de la Garde l’emporte.

     

    Le cimetière d’Eylau se trouve au centre du front; la bataille rétablie en ce sec­teur, Napoléon attend la décision que doivent apporter son aile droite, sous Davout, et son aile gauche, sous Ney. Mais Ney tarde et Davout voit, face à lui, l’ennemi recevoir des renforts qui lui permettent de se dégager; une ultime attaque de Ney décide les Russes à se retirer. Les Français, en raison de leur épuisement, du froid et de la neige, renoncent à les poursuivre.

    Les Russes laissent à Eylau 25 000 tués et les Français 18000. La bataille est restée indécise. Napoléon devra attendre le mois de juin 1807 et la victoire de Friedland pour forcer le tsar Alexandre Ier à demander un armistice. C’est alors qu’auront lieu les célèbres conversations de Tilsit que suivra un traité d’amitié franco-russe.

     


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